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Comment se faire indemniser suite à la pose d'une prothèse défectueuse ?

L'évolution des technologies médicales a permis d'améliorer considérablement la qualité de vie des patients grâce à des dispositifs médicaux comme les prothèses de hanche. Cependant, il arrive que ces dispositifs présentent des défauts, entraînant des préjudices pour les patients. Dans ce contexte, la question de la responsabilité, tant du producteur que du chirurgien, devient essentielle. L'arrêt de la Cour de cassation du 26 février 2020 (n° 18-26.256) apporte un éclairage précieux sur cette problématique.

Cet article analyse les responsabilités respectives du producteur de la prothèse de hanche défectueuse et du chirurgien qui l'a implantée, ainsi que le régime d'indemnisation applicable aux victimes.

1. Les faits de l’arrêt de la Cour de Cassation du 26 février 2020

Dans cette affaire, un patient avait subi la pose d’une prothèse de hanche, qui s’était révélée défectueuse après l’opération. Cette défectuosité avait entraîné des douleurs persistantes, nécessitant une nouvelle intervention chirurgicale. Le patient a donc engagé des actions en responsabilité tant contre le producteur de la prothèse que contre le chirurgien qui l’avait implantée.

Le litige portait sur la question de savoir qui, entre le producteur et le chirurgien, devait être tenu pour responsable des dommages subis par le patient en raison de la défectuosité du produit.

2. La responsabilité du producteur de la prothèse de hanche défectueuse

En droit français, le régime de responsabilité du producteur de produits défectueux est encadré par la directive européenne 85/374/CEE, transposée en droit interne par les articles 1245 et suivants du Code civil. Le producteur est tenu de réparer les dommages causés par un défaut de son produit, indépendamment de toute faute de sa part.

La Cour de cassation, dans son arrêt du 26 février 2020, a rappelé que la responsabilité du producteur est de nature objective. Cela signifie qu’il suffit de prouver la défectuosité du produit et le lien de causalité entre cette défectuosité et le dommage pour que la responsabilité du producteur soit engagée.

2.1. Définition du défaut selon le Code civil

Selon l’article 1245-3 du Code civil, un produit est défectueux lorsqu’il n’offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s’attendre. Dans le cas d’une prothèse de hanche, cela peut se traduire par un mauvais fonctionnement de la prothèse, une usure prématurée ou des matériaux inappropriés causant des complications pour le patient.

2.2. L'indemnisation en cas de défaut du produit

En matière de prothèse défectueuse, le patient victime peut obtenir réparation de tous les dommages subis, qu'ils soient corporels (douleurs, immobilisation, réintervention) ou moraux (angoisse, stress, perte de confiance en le corps médical). Le producteur peut cependant s'exonérer de sa responsabilité en prouvant certaines causes exonératoires, notamment si le défaut est dû à une évolution imprévisible des connaissances scientifiques ou si le produit a été mal utilisé par le patient ou le professionnel de santé. Cependant, dans ce cas précis, aucune cause exonératoire n'a été retenue par la Cour.

3. La responsabilité du chirurgien dans la pose d’une prothèse de hanche défectueuse

La responsabilité du chirurgien est également un point central de cet arrêt. En tant que professionnel de santé, le chirurgien a une obligation de moyens, c’est-à-dire qu’il doit tout mettre en œuvre pour garantir le bon déroulement de l’intervention, mais il n’est pas tenu à un résultat. Toutefois, cette responsabilité peut être engagée dans certaines conditions.

3.1. L’obligation d’information du chirurgien

L’article L1111-2 du Code de la santé publique impose au chirurgien une obligation d'information renforcée. Le praticien doit informer le patient des risques liés à l’intervention, y compris des risques de défaillance des dispositifs médicaux utilisés. Dans le cadre de cet arrêt, si le chirurgien n’a pas correctement informé le patient sur les risques de défectuosité de la prothèse, il pourrait voir sa responsabilité engagée.

3.2. La faute dans le choix de la prothèse

Le chirurgien pourrait également voir sa responsabilité engagée si le choix de la prothèse s’avère inadapté aux caractéristiques du patient (âge, morphologie, activité physique). Dans cette affaire, la Cour n’a cependant pas relevé de faute dans le choix de la prothèse par le chirurgien.

4. L’arrêt du 26 février 2020 : L’articulation des responsabilités

L’arrêt de la Cour de cassation du 26 février 2020 met en évidence deux principes clés en matière de responsabilité médicale liée à une prothèse défectueuse.

  • Responsabilité objective du producteur : Le producteur de la prothèse est responsable de la défectuosité du produit, peu importe que cette défectuosité soit intentionnelle ou non.
  • Responsabilité potentielle du chirurgien : Le chirurgien peut voir sa responsabilité engagée, mais uniquement en cas de manquement à ses obligations d’information, de surveillance ou de choix du matériel.

Dans cette affaire, la Cour de cassation a finalement retenu la responsabilité du producteur, mais pas celle du chirurgien, car il n’a pas été démontré que ce dernier avait commis une faute dans la pose ou le choix de la prothèse.

5. Le régime d’indemnisation pour le patient victime

En cas de prothèse de hanche défectueuse, le patient dispose de plusieurs voies pour obtenir réparation :

  • Action en responsabilité contre le producteur : Cette action, fondée sur la responsabilité du fait des produits défectueux, permet d’obtenir une indemnisation rapide, sous réserve de prouver le défaut de la prothèse et le lien avec le dommage.
  • Action en responsabilité contre le chirurgien : Cette voie est plus délicate, car elle nécessite de prouver une faute du praticien, par exemple une mauvaise information ou un choix inadapté de la prothèse.
  • L’assurance : En parallèle, le patient peut également solliciter son assurance responsabilité civile ou celle du chirurgien pour obtenir une indemnisation complémentaire.

6. Conclusion

L'arrêt du 26 février 2020  de la Cour de cassation illustre bien les enjeux de la responsabilité dans le cadre d’une prothèse de hanche défectueuse. Le producteur est, en principe, le principal responsable des dommages causés par la défectuosité du produit. Cependant, le chirurgien peut également être mis en cause si une faute de sa part est démontrée, que ce soit dans le choix de la prothèse ou dans l’information délivrée au patient.

Cet arrêt rappelle l’importance pour les patients de connaître leurs droits et les recours possibles en cas de problème lié à une prothèse médicale. Il souligne également la nécessité pour les professionnels de santé d’assurer une information claire et complète sur les risques inhérents aux dispositifs médicaux.

Arrêt de la Cour de Cassation du 26 février 2020

FB AVOCATS: responsabiloité médicale suite à pose d'une prothèse de hanche

Le 11 octobre 2024